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Apparences


Apparences Année : 2000

Titre original : What Lies Beneath

Réalisateur : Robert Zemeckis

Claire et Norman Spencer (Michelle Pfeiffer et Harrison Ford), mariés depuis de nombreuses années, voient leur unique enfant quitter le foyer familial pour aller à l'université. Claire, profondément affectée par ce départ, semble sombrer progressivement dans une forme aiguë de dépression, voire de démence, mal-être qui atteint son paroxysme lorsque celle-ci voit, ou croit voir, de la fenêtre de la chambre conjugale, son voisin mettre le corps de sa femme dans le coffre de sa voiture. C'est alors que commence pour notre héroïne une lente et longue descente aux enfers, où apparences et apparitions, par le truchement d'un jeu de miroirs labyrinthique, finiront par lui révéler le terrible secret qui depuis longtemps gît, silencieux et plongé dans l'oubli, sous la surface d'une vie de couple apparemment parfaite.

Robert Zemeckis, rendu célèbre par la trilogie désormais culte des Retour vers le futur (1985, 1989 et 1990), change ici radicalement de registre, proposant au spectateur une oeuvre esthétique au suspense hitchcockien, servie par des acteurs inspirés et une musique en adéquation parfaite avec le propos du film. Si l'on peut regretter la relative légèreté du scénario, par trop prévisible - le spectateur attentif et fin connaisseur du genre ici concerné repèrera sans mal, dès les premières minutes du film, le plan tout aussi spéculaire que spectaculaire qui, par sa nature même, trahit ce qui devrait normalement constituer la grande révélation de la dernière partie du film (la référence faite à Fenêtre sur cour (1954) ne trompe personne) -, on ne peut cependant que se laisser avec plaisir envoûter par l'atmosphère générale de cette réalisation soigneusement rythmée, où le rationnel le dispute à l'irrationnel pour noyer l'héroïne - et le spectateur, focalisation interne oblige - dans le doute et la suspicion, faisant de la sorte monter la tension jusqu'à ce qu'enfin la vérité surgisse.

S'agissant de faire monter la tension, autrement dit le suspense, il est intéressant de noter, ici, que la prévisibilité du scénario semble justement servir le dessein du réalisateur. En effet, l'avance que prend le spectateur sur l'héroïne en observant avec attention ce qui se joue devant ses yeux - et tente par la même occasion de se jouer de lui, tout en l'incitant à se concentrer sur la forme même du film (les plans, le montage, la musique...) -, provoque un sentiment grandissant d'appréhension, puisqu'on finit par ne plus se demander qui, mais quand et comment - et Zemeckis de se réapproprier ainsi les codes du cinéma d'horreur, ceux-là même qu'inventa le grand Alfred Hitchcock dans Psychose (1960) et que John Carpenter perfectionna dans Halloween (1978). Et c'est donc là que se situe, en dépit des apparences et contre toute attente, tout l'intérêt du film. L'angoisse plutôt que l'enquête, la peur plutôt que la preuve, et donc l'irrationnel plutôt que le rationnel.

En conclusion, Apparences, sans être un chef-d'oeuvre, parvient néanmoins sans mal à se hisser dans la catégorie de ce que l'on pourrait appeler les bons films, enrichissant par la même occasion la filmographie pour le moins hétéroclite d'un réalisateur talentueux.

Note : 7/10


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