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GTO


GTO Nombre de tomes : 25

Années de parution au Japon : 1997 - 2002

Titre original : GTO (Guretô Tichâ Onizuka)

Genre : shônen

Créateur : Tôru Fujisawa

Ancien membre d'un gang de motards, Eikichi Onizuka, 22 ans, toujours puceau, rêve de devenir enseignant. Et ce ne sera pas facile. Le concours (pour lequel il est loin d'avoir le niveau), sa première classe en tant que remplaçant (pleine à ras bord de mâles à la mine patibulaire), son supérieur hiérarchique amer (Uchiyamada, qui ne souhaitera jamais que son renvoi), ses élèves à problèmes tous plus cruels les uns que les autres, son obsession pour les jeunes filles en fleur et son amour inavoué pour sa collègue Fuyutsuki seront autant d'épreuves à franchir pour devenir le professeur exceptionnel qu'il s'est donné pour objectif d'être un jour. Au cours de cette quête, son sens de l'honneur, de l'humour, de l'amitié, de la justice et des responsabilités, ainsi que son excentricité caractéristique, seront des atouts majeurs face à toute une société paralysée par un conformisme consumériste délétère, dont les enseignants sont malheureusement souvent le triste reflet. Parviendra-t-il, aidé de son meilleur ami, Ryuji, de Fuyutsuki, sa collègue, et de Mme Sakurai, la secrétaire générale du collège, à devenir le Great Teacher Onizuka promis dans le titre du manga ?

A première vue, l'oeuvre de Tôru Fujisawa ne dispose pas de qualités flagrantes : dessins fouillis au point d'en devenir difficilement compréhensibles (surtout dans les premiers tomes), dialogues écrits avec les pieds et traduits par un analphabète, vulgarité sans nom, scénario sens dessus dessous, rien ne semble a priori pousser le lecteur à se rendre au-delà des premières pages pour se plonger dans l'univers surréaliste de cet ancien délinquant devenu vacataire au collège. Et pourtant, force est de constater que la sauce prend malgré tout : misant tout sur le charisme de son passe-muraille de personnage principal, Tôru Fujisawa parvient à créer une histoire addictive dont chaque péripétie verrouille un peu plus le suspense d'un mécanisme sans faille. Pris au jeu de ce blondinet un brin casse-cou, de ses mésaventures à répétition, de ses coups de coeur et de ses coups de gueule, le lecteur découvre une leçon de morale moderne dans ce monde qui en paraît si fréquemment dépourvu. Situations cocasses, pièges machiavéliques, élèves suicidaires, collègues réfractaires, hiérarchie paraplégique et autres obstacles permettront à Eikichi Onizuka de prouver sa valeur. Car son passé de délinquant juvenile n'en fait pas un homme mauvais, bien au contraire. Quant à son expérience, elle le rapproche de ses élèves les plus difficiles, qu'il tentera par tous les moyens d'aider, voire de sauver, quitte à se sacrifier pour eux. Un dévouement total, en somme.

On l'aura compris, c'est dans la mise en scène de situations toujours plus improbables et la peinture de personnages hauts en couleur qu'excelle l'auteur de GTO : les idiosyncrasies de chacun ne manquent en effet jamais de produire des mélanges explosifs au contact des autres - et Fujisawa de nous rappeler qu'il n'est jamais simple de vivre en groupe - et de conduire l'immortel Onizuka (même tomber d'un toit ne semble pas pouvoir le tuer) dans des impasses en apparence inextricables. A lui, dès lors, de tout mettre en oeuvre pour dénouer les noeuds dont sont prisonniers les autres personnages, sa maïeutique moralisatrice lui donnant à tous les coups l'occasion de montrer et de démontrer combien comptent encore les valeurs morales dans un système en décrépitude au sein duquel l'individu, totalement aliéné, perd parfois pied. Il devient dès lors un grand frère, que dis-je, un père, pour ces jeunes en manque de repères.

Ce professeur idéal (bien que piètre enseignant dans sa matière) tient bien évidemment moins de la réalité, fiction oblige, que du fantasme : imperturbable en toutes circonstances, imbattable au combat, toujours présent pour ses élèves, fin connaisseur de la psychologie humaine et doté d'une inébranlable volonté, Onizuka fait de son métier une profession de foi, son dévouement se voulant héroïque, voire super-héroïque (si toutefois le néologisme m'est permis), tant et si bien qu'en fin de compte, entre démonstrations de force, cascades abracadabrantesques et scènes fantasmagoriques au possible, il apparaît que cette grande leçon de vie qu'est GTO n'a pas en réalité pour but de faire changer le monde de l'enseignement, loin s'en faut - bien qu'on y puisse trouver de nombreuses critiques du système japonais -, mais d'apporter un peu d'espoir et de rêve à ses lecteurs (les adolescents et les jeunes adultes semblant être le public visé), tout en leur inculquant un certain nombre de valeurs.

Le Great Teacher Onizuka, ce n'est donc pas seulement Onizuka, mais également le manga GTO dans son ensemble, une oeuvre accrocheuse qu'on aura plaisir à lire et peut-être même à relire en dépit de ses menus défauts (quelques longueurs dues à l'aspect répétitif du scénario, des graphismes brouillons - auxquels on s'habitue cependant très vite -, des filles qui se ressemblent toutes, une orthographe aléatoire dans la version française), ne serait-ce que pour retrouver ses protagonistes attachants et l'anti-conformisme à toute épreuve de maître Onizuka, dont le retour dans Shonan 14 Days, du même auteur, fera certainement l'objet d'une future critique. En attendant, l'auteur de ces lignes vous recommande vivement la lecture de GTO.

Note : 8/10


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