Année : 2010
Titre original : The King's Speech
Réalisateur : Tom Hooper
Les temps sont durs. Bientôt, la deuxième guerre mondiale fera rage. Et tandis qu'Adolf Hitler envahit peu à peu l'Europe, Albert,
alias Bertie, pour les intimes, fils du roi d'Angleterre George V, tente de surmonter un vieil handicap qui depuis l'enfance le paralyse : son
bégaiement. C'est lorsque sa femme, Elizabeth, le présente à Lionel, un thérapeute aux méthodes peu orthodoxes, qu'enfin Bertie
retrouve l'espoir de vaincre un jour ses difficultés d'élocution. Malheureusement, survient en 1936 un grand malheur au sein de la famille royale :
George V décède. Son fils David lui succède alors brièvement puis, par amour pour une femme deux fois divorcée, cède le trône à
son frère cadet, Bertie, qui devient officiellement George VI. Ce qui le conduira, trois ans plus tard,
à prononcer un discours radiophonique à l'occasion de l'entrée en guerre de l'Angleterre. Une gageure pour George VI, qui se devra dès lors,
pour sa nation, pour son peuple et pour les siens, de terrasser son plus terrible ennemi - lui-même.
Autant le dire tout de suite, c'est une belle surprise que ce Discours d'un roi : d'un synopsis
d'une étonnante simplicité (un homme fait tout pour mettre un terme à son bégaiement), Tom Hooper tire un film d'une grande profondeur
historique et psychologique, mêlant la petite et la grande histoires (c'est la rencontre entre Albert, fils du roi George V, et
Lionel, acteur raté sorti de nulle part, mais également celle des deux vies (publique et privée) de George VI) pour nous mener directement
au début de la deuxième guerre mondiale, qui commençait donc pour les Anglais par la victoire de deux hommes devenus amis dans l'épreuve.
Le réalisateur
n'hésite d'ailleurs pas à établir un parallèle particulièrement ironique entre Adolf Hitler et George VI : alors qu'Albert
regarde des images du Führer s'exprimant face aux foules en délire du Reich (ce sont en réalité des extraits de Triumph des Willens,
un film de propagande réalisé en 1935 par Leni Riefenstahl, qui révolutionnait à l'époque la technique du documentaire), on lui demande s'il comprend
ce qu'Hitler dit - sa réponse : "I don’t know but… he seems to be saying it rather well." ("Je ne sais pas, mais... il semble le dire plutôt bien.").
C'est donc, en quelque sorte, avant même que la guerre n'éclate, déjà le combat de David contre Goliath.1
Mais ce n'est pas vraiment là que ce situe tout l'intérêt de l'oeuvre. En effet, c'est avant tout dans des choix esthétiques tout à la fois
pertinents et cohérents (à des plans
majestueux et souvent statiques, comme autant de tableaux pour sa majesté lors de ses apparitions publiques, s'opposent des plans tout aussi beaux,
mais plus intimistes et surtout beaucoup plus mobiles,
lorsque Bertie se retrouve seul dans sa lutte avec Lionel - leur mouvement se faisant alors la plupart du temps spiralaire),
et dans un jeu d'acteur exemplaire (Colin Firth (Albert) et Geoffrey Rush (Lionel)
excellent dans leurs rôles respectifs, rendant de la sorte extrêmement touchante la relation d'amitié qui lentement se noue tout au long du
film entre les deux protagonistes),
que se joue l'essentiel de l'oeuvre de Tom Hooper. En un mot, c'est beau.
La musique, la photographie, le rythme (celui d'une danse ? De l'une de ces chansons qui permettent au roi d'améliorer sans mal son élocution ?),
les décors, tout concourt à faire de ce film un régal pour la rétine.
En conclusion, Le Discours d'un roi s'offre au spectateur comme une somptueuse ode à la persévérance,
servie par la performance d'acteurs au sommet de leur art, des dialogues bien pensés, des musiques en adéquation parfaite avec
l'atmosphère du film et des plans de toute beauté, le tout rythmé par un montage efficace. En somme, il s'agit là d'un divertissement
royal à ne manquer sous aucun prétexte, et l'auteur de ces lignes se permettra donc, pour couronner le tout, d'accorder à cette oeuvre une note
digne de ce nom.
Note : 9/10
1 : Le parallèle est d'autant plus ironique que les extraits des discours d'Hitler sont tirés de Triumph des Willens, dont le titre pourrait se traduire par Le Triomphe de la volonté... triomphe que célèbre justement Tom Hooper dans son Discours d'un roi...
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